Breaking news à Bruxelles : le nouveau nom du SAMU social de Bruxelles… « New Samusocial* » (l’astérisque n’est pas une faute de frappe, c’est provisoire, si si), on avouera que le brainstorming n’a pas été épuisant : il s’agit officiellement de « l’appellation juridique de la nouvelle entité », en attendant mieux. On ne peut pas reprocher à l’équipe dirigeante un excès de créativité et, comme dirait le monde politique bruxellois, « wait and see » – peut-être que le marketing urbain finira par livrer une perle inattendue.
Mais derrière cette volonté de changement, faut-il voir un simple plan de com’ pour rassurer le public après les vieux déboires ou une vraie révolution de gouvernance ? L’évolution structurelle semble réelle : le Conseil d’administration est ouvert à la société civile (salut !), avec cinq administrateurs issus de l’aide aux sans-abri et du monde associatif, aux côtés de six représentants des partis du gouvernement bruxellois, chacun son badge coloré.
Pourquoi changer de nom ? Est-ce vraiment différent ?
2017 : l’affaire éclate. Les rémunérations volent, la transparence et la confiance plongent — sans-abri sur le terrain, abuses en coulisse. Les assises régionales s’enflamment, tout le monde promet que « cette fois c’est la bonne ». Solution : on dissout, on transforme le statut en association publique, et on prépare un New Samusocial estampillé safe pour le citoyen. Nouveau nom, nouvelles résolutions, nouvelles signatures… et la même question dans les esprits : est-ce que ça va vraiment changer ?
Gouvernance : pluralisme, transparence et société civile au premier plan
Le nouveau Conseil d’administration du Samusocial compte 11 administrateurs, dont 6 représentants des autorités publiques régionales issus de cinq partis différents, et 5 administrateurs issus du secteur sans-abri et de la société civile. Le président du CA est apolitique, nécessairement issu du secteur humanitaire ou associatif, gage d’intégrité et d’expérience sociale.
La gouvernance applique des règles strictes :
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Non-rémunération des membres du CA.
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Double signature obligatoire pour tout acte ou dépense (garantie contre toute concentration du pouvoir entre quelques mains).
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Fin de la fonction d’Administrateur Délégué, gestion courante confiée à un Directeur général apolitique.
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Des représentants du secteur associatif jouent un rôle central dans l’orientation et le suivi des missions.
Le CA est donc un lieu de co-gestion et de débat où la société civile n’est pas qu’un alibi – elle intervient sur les choix stratégiques.
Qui compose le Conseil d’administration côté société civile ?
Les cinq administrateurs actuels représentants de la société civile et du secteur sans-abri (selon les informations officielles du Samusocial) sont issus de structures reconnues de l’aide sociale à Bruxelles :
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Stéphane Heymans (Médecins du Monde)
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Sarah Lorand (Santé Communautaire / Hôpital Saint-Pierre)
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Laurent Demoulin (asbl Diogènes)
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Delphine De Bleeker (médiation de dettes, ex-Croix-Rouge)
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Un membre indépendant est à nommer pour compléter le panel.
Gouvernance : société civile au menu… mais pas sans check-up
Il faut saluer l’ouverture. Désormais, non seulement les partis (PS, MR, Ecolo, etc.) siègent au Conseil d’administration, mais la société civile lève la main : Diogènes, Santé Communautaire, Médecins du Monde et autres pros du terrain, tous conviés pour un casting non rémunéré. Avec la double signature obligatoire, c’est fini l’administrateur délégué qui panache tout — les validations sont aussi nombreuses que les procès-verbaux, et tout le monde applaudit. Mais comme la méfiance reste le plat du jour, on se demande ce que fait chaque membre… et surtout, combien d’argent public tombe dans la marmite associative. Alors, let’s do the background check : Diogènes ? Financement de la Région, dons privés, Commission communautaire commune. Médecins du Monde ? Bingo : la Région bruxelloise leur a versé 7,4 millions en 2024 — autant dire que la main gauche du Samusocial file souvent à la main droite de ses amis du CA. Santé Communautaire ? Encore des subventions, encore de l’argent public, tout est vérifié à chaque audit, mais la casserole est large.
Missions : nobles, précises, indiscutables… à condition de ne pas perdre le Nord
Un lit, un repas, un soin, un accompagnement, une orientation : toutes les actions du New Samusocial sont d’un altruisme louable. Maraudes, centre d’hébergement, soins sur place, permanence téléphonique… Impossible de remettre en cause la nécessité de l’aide. Mais, dans le petit monde politique bruxellois, la traçabilité et la diligence ne sont pas exactement des traditions ancestrales. Les rapports financiers pleuvent ; les audits s’enchaînent ; on fait semblant de croire que, cette fois, tout l’argent va là où il faut. Après cinquante ans d’habitude PS, le scepticisme n’a pas disparu. Oui, le CA publie tout, oui il y a des audits, oui le citoyen peut consulter les subventions. Mais le réflexe du gentil contribuable reste : « Wait and see ».
Pourquoi le PS doit-il nous convaincre plus qu’autrui ?
Parce que le Samusocial a longtemps servi de terrain de jeu pour quelques apparatchiks du parti. Entre les rémunérations miraculeuses, les avantages collatéraux et l’absence de comptes à rendre, tout le monde a compris que la bonne gouvernance du New Samusocial tient à la rigueur et au contrôle externe, et pas au pedigree politique. Si le parti socialiste promet aujourd’hui la transparence et la justice sociale, il faudra un peu plus que des bulletins officiels pour emporter la foi collective. La société civile, c’est bien, l’audit permanent, c’est mieux.
Le grand ballet des financements… publics, bien entendu
Diogènes, Médecins du Monde, Santé Communautaire : tous sont au cœur du CA du New Samusocial, tous mènent des missions irréprochables auprès des plus vulnérables. Mais tous reçoivent aussi une part considérable de leur budget via subsides publics. Le citoyen, entre deux audits et deux communiqués, peut se demander s’il n’y aurait pas, dans le grand circuit de l’aide sociale bruxelloise, un soupçon de consanguinité budgétaire… Les associations sont sélectionnées pour leur expertise, leur indépendance, et leur réseau sur le terrain. Mais il n’est jamais inutile de rappeler que trop de proximité entre validation, gestion et attribution est la recette de tous les dérapages. Bref, on félicite, mais on surveille.
Conclusion : de la noblesse à l’exigence
Personne ne remet en cause la noblesse des activités du New Samusocial, ni l’ardeur des associations qui le portent. La précarité grimpe, les défis se multiplient, le besoin est de plus en plus vital. Mais le public, échaudé par l’histoire sous le PS et les promesses politiques, réclame désormais la preuve : des chiffres, des noms, des audits, et une traçabilité à toute épreuve. Le New Samusocial aura beau changer de nom, le vrai changement se mesurera dans la pratique, pas dans la communication.
À Bruxelles, la crise sociale ne s’arrêtera pas sur un panneau d’entrée tout neuf. Ce qui compte, désormais, c’est que chaque euro public serve—réellement—à sortir du désastre passé. On applaudit, on espère… et on attend. Wait and see, comme dirait le monde politique local, avant de recommencer le prochain rebranding.
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