Ou comment des étudiants en droit découvrent que leurs choix ont des conséquences
Voilà une belle histoire de démocratie étudiante qui tourne au fiasco. Les futurs juristes de l’ULB viennent de nous offrir un cas d’école parfait : comment transformer une tradition sympathique en polémique internationale, tout en révélant au passage leur méconnaissance des règles démocratiques les plus élémentaires. Chapeau !
La participation fantôme : les chiffres qui parlent
Mais voici le plus savoureux : les chiffres de participation révèlent l’ampleur du « phénomène démocratique ». Selon les données officielles de RTBF, le second tour du vote a mobilisé 50,2% des étudiants de la promotion. Rima Hassan est arrivée en tête avec 42% des voix des votants.
Faisons le calcul : 42% de 50,2%, cela représente environ 21% des étudiants de la promotion qui ont effectivement choisi Rima Hassan. Une « majorité écrasante » de moins d’un étudiant sur quatre ! Voilà qui relativise singulièrement cette « victoire démocratique » tant revendiquée.
Cette arithmétique électoraire révèle une réalité moins flatteuse que les grands discours sur la « tradition démocratique ». Car si ce vote avait été massif et représentatif, nos champions de la transparence démocratique s’empresseraient de crier victoire avec des pourcentages impressionnants. « 85% de participation, 70% pour Rima Hassan ! » Ça aurait eu de la gueule, non ?
Le silence initial sur ces chiffres suggère plutôt ce que l’on soupçonnait : un vote confidentiel, où une minorité active impose son choix à une majorité silencieuse. L’art du militantisme étudiant version 2.0 : faire le buzz avec l’abstention de ses camarades.
Imagine-t-on François Hollande élu avec 21% des inscrits proclamer sa « légitimité démocratique » ? Nos futurs juristes découvriront peut-être un jour que la légitimité se mesure aussi en participation effective, pas seulement en décibels médiatiques.
Rima Hassan, l’icône de la promotion 2025
Mais passons au fond : le choix lui-même. Rima Hassan, donc. Eurodéputée LFI, militante pro-palestinienne, et surtout… visée par plusieurs procédures judiciaires pour apologie du terrorisme. Quel beau symbole pour de futurs avocats ! « Promotion Rima Hassan 2025 » : voilà qui va faire sensation sur les CV.
Car enfin, de qui parle-t-on ? D’une femme qui déclare publiquement que « le Hamas a une action légitime du point de vue du droit international ». Le Hamas, cette organisation classée terroriste par l’Union européenne, les États-Unis, et une vingtaine d’autres pays. Mais détail, sans doute.
Nos étudiants en droit semblent avoir oublié un principe élémentaire : en droit, les mots ont un sens. Quand on étudie le droit international, on apprend généralement à distinguer résistance légitime et terrorisme. Manifestement, certains cours ont été séchés.
Le mythe de la tradition démocratique
« Une tradition démocratique depuis 2018 », clament fièrement les intéressés. Sept ans, donc. Une « tradition » plus jeune que TikTok ! Et pendant ces sept années, nos étudiants ont choisi qui ? Robert Badinter, Simone Veil… Des personnalités consensuelles, respectées de tous.
Puis soudain, cette année, inspiration révolutionnaire : et si on prenait quelqu’un de « clivant » ? Quelqu’un qui fait polémique ? Quelqu’un visé par la justice ? Quelle originalité ! Comme si choisir la provocation était un gage de maturité intellectuelle.
La participation fantôme
Mais voici le plus savoureux : personne ne connaît les chiffres de participation. Combien d’étudiants ont voté ? Mystère. Sur combien d’inscrits ? Secret défense. Quel taux de participation ? Circulez, il n’y a rien à voir.
Cette opacité en dit long. Car si le vote avait été massif et représentatif, nos champions de la transparence démocratique s’empresseraient de le crier sur tous les toits. « 85% de participation, 70% pour Rima Hassan ! » Ça aurait de la gueule, non ? Le silence radio suggère plutôt un vote confidentiel, organisé entre copains, histoire de faire le buzz.
Imagine-t-on François Hollande gardant secrètes les statistiques de participation à la présidentielle ? Nos futurs juristes découvriront peut-être un jour que la légitimité démocratique se mesure aussi en chiffres.
L’art du CV suicidaire
Mais prenons un instant le point de vue pratique. Ces étudiants vont bientôt chercher du travail. Cabinets d’avocats, entreprises, institutions… Imaginez le recruteur qui lit : « Diplômé de la promotion Rima Hassan 2025 ».
Premier réflexe : Google. Deux clics plus tard : « Ah, celle qui soutient le Hamas ? » Bonjour l’ambiance ! Dans un marché de l’emploi déjà tendu, choisir délibérément une marraine sulfureuse relève soit du courage héroïque, soit de l’inconscience totale. À vous de voir.
Car contrairement à ce que croient nos idéalistes, les employeurs ne recrutent pas pour faire de la politique. Ils cherchent des profils fiables, pas des porte-étendards de causes clivantes. Mais peut-être que nos révolutionnaires comptent tous finir militants associatifs ?
Le syndrome de la génération indignée
Cette affaire révèle surtout un mal générationnel : la confusion entre provocation et engagement, entre buzz et conviction. Choisir Rima Hassan, c’est « oser », « résister », « dénoncer ». Peu importe que cette « résistance » se résume à un clic sur Google Form.
Nos étudiants se pensent courageux alors qu’ils ne prennent aucun risque personnel. Ils ne manifestent pas, ne militent pas, ne s’engagent pas. Ils cliquent. Et après, ils s’indignent qu’on remette en question leur « processus démocratique ». Génération clavier, génération indignation facile.
Le dilemme cornélien de l’ULB : démocratie ou tutelle ?
Face à cette tempête médiatique, l’ULB s’est retrouvée dans une position délicate : valider ce choix étudiant controversé ou jouer les parents sévères. Après 1h30 de débats « plutôt calmes et bien cadrés » selon La Libre – on imagine l’ambiance feutrée des salons bourgeois -, le Conseil facultaire a tranché : validation, mais avec toutes les précautions oratoires possibles.
Pierre Klein, le doyen, nous livre alors une masterclass de rhétorique administrative : « Cette décision leur appartient. Elle témoigne de leur besoin de s’engager face aux drames qui se déroulent actuellement à Gaza. Nous nous devons de la respecter. » Traduction libre : « Ils ont fait n’importe quoi, mais on ne peut pas le dire ouvertement. »
Car l’ULB se trouve prise dans un piège savoureux de ses propres valeurs. Comment une université qui prône le « libre examen » depuis sa fondation peut-elle soudain décider que ses étudiants pensent mal ? Comment une institution qui forme les futurs défenseurs du droit peut-elle invalider un vote sous prétexte que le résultat déplaît ?
L’université tente alors un numéro d’équilibriste digne du Cirque Plume : « Ce vote n’engage ni la Faculté ni l’Université », précise-t-elle avec insistance. « Il s’agit d’un nom symbolique qui ne figurera pas dans les documents officiels. » Bref, vous avez le droit de choisir, mais nous, on s’en lave les mains. La démocratie étudiante, oui, mais avec clause de non-responsabilité !
Cette gymnastique intellectuelle révèle tout le malaise : faut-il traiter ces étudiants en adultes responsables de leurs choix ou en adolescents à recadrer ? L’ULB choisit la voie du milieu : ils sont assez grands pour voter, mais pas assez pour assumer. Une démocratie sous surveillance parentale, en quelque sorte.
Le plus cocasse ? Pour éviter de futurs « incidents », l’université annonce déjà la mise en place de « lignes directrices et un règlement » pour encadrer les prochains votes. Autrement dit : la prochaine fois, on vous laissera choisir… parmi une liste pré-approuvée. La démocratie étudiante, version catalogue IKEA : vous assemblez vous-mêmes, mais selon nos instructions.
À quoi ça sert, au juste ?
Question basique : à quoi sert vraiment de nommer une promotion ? Tradition folklorique sans conséquence ? Alors pourquoi tant de passion ? Geste symbolique fort ? Alors assumez les conséquences.
Car le nom d’une promotion, c’est comme un tatouage : ça reste. Dans dix ans, ces diplômés traîneront encore cette référence. Quand Rima Hassan aura disparu des radars médiatiques, quand ses positions actuelles paraîtront datées, ils porteront encore ce nom. Pari sur l’avenir ou boulet à vie ?
Les vraies leçons
Cette affaire enseigne finalement plusieurs choses. D’abord, qu’organiser un vote démocratique nécessite plus qu’un Google Form et de bonnes intentions. Ensuite, que choisir ses symboles demande réflexion, pas impulsion. Enfin, que jouer les révolutionnaires depuis son amphi est plus facile que d’en assumer les conséquences sur le marché du travail.
Nos étudiants découvrent que leurs actes ont des répercussions. Quelle surprise ! Ils voulaient faire le buzz ? Mission accomplie. Ils voulaient marquer l’histoire ? C’est fait aussi, mais peut-être pas comme espéré.
L’épilogue attendu
Le Conseil facultaire tranchera jeudi. Validation ou annulation ? Dans les deux cas, nos futurs juristes auront appris une leçon précieuse : en démocratie, on assume ses choix. Et parfois, la liberté de choisir inclut la liberté… de mal choisir.
Reste à savoir si cette génération Google Form en tirera les bonnes conclusions. Ou si elle préfèrera jouer les victimes incomprises. Le suspense demeure, mais le pronostic est facile.
« Promotion Rima Hassan 2025 » : une mention qui fera date sur les CV. Pour le meilleur ou pour le pire.

Alice Vandendorpe est une rédactrice chevronnée avec plus de 10 ans d’expérience dans le journalisme. Elle excelle dans la création de contenus captivants et informatifs, et dirige notre équipe avec passion et dévouement.
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