L’art bruxellois de faire les poches avec le sourire
Bruxelles! Capitale de l’Europe, ville de tous les possibles… surtout celui de voir ses impôts grimper plus vite que l’inflation. Pour 2025, nos édiles communaux nous réservent quelques surprises fiscales qui risquent de faire grincer des dents – mais pas les leurs.
141 926 431,40 euros. Voilà le montant exact – à quelques centimes près, parce qu’on ne plaisante pas avec la précision comptable – que la Ville de Bruxelles compte soutirer à ses administrés via les taxes communales en 2025. Une « nouvelle formule d’indexation » a même été adoptée pour s’adapter à « l’évolution économique ». Traduction libre : comme tout augmente, nous aussi.
Koekelberg ou l’art de faire porter le chapeau à l’Arizona
Du côté de Koekelberg, la bourgmestre Olivia P’tito (PS) ne mâche pas ses mots. Face à l’assemblée communale lundi soir, elle dégaine son expression favorite : l' »Arizona budgétaire« . Comme quoi, même en politique locale, on a le sens de la métaphore western.
« Oui, le collège charge l’Arizona car ses choix pèseront sur les finances communales », lance-t-elle avec la verve d’un shérif face aux bandits de grand chemin. Les réformes du chômage et la fusion des zones de police ? Des mesures « violentes » pour les finances locales, rien que ça.
La facture de l’ambition
Qu’à cela ne tienne : si le gouvernement fédéral ne compense pas ses réformes, Koekelberg n’hésitera pas à faire les poches de ses citoyens. 38 millions d’euros d’investissements sont prévus sur trois ans – il faut bien les trouver quelque part, ces sous !
Rénovation du pavillon Vanaudenhove, nouvelle bibliothèque, développement du quartier Jacquet, création d’une Maison des Femmes… L’ambition est là, reste à savoir qui va payer l’addition.
Le grand bal des centimes additionnels
Quatre communes sur la piste de danse
Parce que Koekelberg n’est pas seule dans cette valse fiscale, quatre autres communes bruxelloises ont déjà sorti leurs calculettes pour 2025 :
- Woluwe-Saint-Pierre fait fort : le précompte immobilier bondit de 2.200 à 2.700 centimes additionnels. Soit une augmentation de 500 points d’un coup – même les prix de l’essence n’osent pas !
- Berchem-Sainte-Agathe suit le mouvement : +500 centimes également (de 3.190 à 3.690)
- Jette reste plus mesurée avec « seulement » 100 centimes de plus (3.890 à 3.990)
- Anderlecht complète ce quatuor de la générosité fiscale inversée
L’IPP dans le collimateur
L’impôt des personnes physiques n’échappe pas non plus au grand dépoussièrage fiscal. Plusieurs communes lorgnent désormais sur cet autre levier pour équilibrer leurs comptes défaillants.
« Virtuellement en faillite » : le nouveau slogan touristique ?
Treize sur dix-neuf
Le plus savoureux dans cette histoire ? Selon les débats parlementaires, 13 communes bruxelloises sur 19 sont « virtuellement en faillite ». Virtuellement, précise-t-on – comme si cela changeait grand-chose au portefeuille des contribuables.
Imaginez le nouveau slogan touristique : « Bruxelles, cœur de l’Europe, où 68% des communes sont virtuellement ruinées ! » De quoi faire fuir les investisseurs… et attirer les collectionneurs de curiosités budgétaires.
Le paradoxe européen
Comment la capitale de l’Europe, qui accueille les institutions qui brassent des milliards, peut-elle voir ses communes locales mendier quelques centimes additionnels ? Mystère et boule de gomme fiscale.
L’optimisme malgré tout
Des projets plein la tête
Malgré ce tableau digne d’un Bruegel version comptable, nos élus gardent le sourire. À Koekelberg, on promet une « commune plus solidaire, durable et ouverte » – ouverte surtout aux nouveaux prélèvements, manifestement.
La bourgmestre P’tito se réjouit même : « Jamais Koekelberg n’aura connu un volume d’investissements aussi important ». Effectivement, quand on vide les poches des citoyens avec autant d’application, les possibilités d’investissement deviennent infinies.
Six priorités pour un budget
La note de politique générale repose sur six priorités ambitieuses : qualité des services publics, égalité, inclusion sociale, rayonnement communal… Tous les projets seront évalués selon trois critères : impact budgétaire (forcément), responsabilité sociétale et inclusion.
Le grand écart bruxellois
Au final, Bruxelles réalise en 2025 un grand écart saisissant : d’un côté, elle abrite les institutions européennes qui brassent des milliards ; de l’autre, ses communes menacent de faire faillite et augmentent leurs impôts pour joindre les deux bouts.
Un paradoxe ? Non, juste l’art bruxellois de transformer une crise budgétaire en opportunité fiscale. Après tout, pourquoi se priver quand on a sous la main des contribuables captifs et des besoins d’investissement « ambitieux » ?
En attendant, les Bruxellois peuvent toujours se consoler : au moins, ils contribuent activement à l’effort budgétaire communal. C’est ça aussi, l’esprit européen.
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